En quoi l’écriture est-elle thérapeutique ?
Article réalisé par Catherine Jubert,
14 juin 2019
Et si le secret du bien-être se trouvait au bout de votre stylo !
Alors que les effets thérapeutiques de la peinture, du modelage, de la musique, de la danse… ne sont plus à prouver, l’écriture bénéficie encore d’une certaine défiance.
Elle est souvent utilisée en complément ou à l’appui d’autres médiations.
Elle fait l’objet de toutes les stigmatisations sociales et renvoie certains participants à de douloureuses situations d’échecs scolaires.
Face à une médiation supposée élitiste, certains évoquent d’anciennes angoisses scolaires, et envisagent l’écriture non sous l’angle pur du plaisir, mais sous celui de la maîtrise orthographique, syntaxique ou même graphique.
Leurs paroles en ateliers sont révélatrices de ces moments d’anxiété : « je n’ai jamais été bon en orthographe ou en rédaction », « je fais trop de ratures », « je crois que je n’ai pas respecté la consigne », « je ne vais jamais arriver à me relire », « est-ce que j’ai le droit de ? ». Certains avouent être venus à l’atelier « la boule au ventre » mais être repartis « léger comme une plume ».
Que s’est-il donc produit entre ces deux moments d’atelier ? Quels sont les mécanismes et leviers propres au médium écriture qui ont levé les angoisses initiales et favorisé le changement dans le vécu de l’atelier ? Quels liens se sont réparés, retissés et ont permis de renouer avec le plaisir et avec soi ?
En d’autres termes, en quoi l’écriture peut-elle être thérapeutique ?
L’écriture comme de reprise entre soi et les autres
Les notions de reprise et de « raccommodage » sont particulièrement pertinentes lorsque l’on parle de l’écriture de textes car la métaphore couturière nous renvoie à l’origine même du mot texte, issu du latin textus, signifiant « tissu ».
L’écriture peut alors être comparée au tissage d’un tissu, reliant des signifiants les uns aux autres pour former un texte.
De l’informe provient une mise en forme, une réorganisation du chaos des idées par la pensée. C’est ce que permettent par exemple les ateliers d’écriture de soi ou autobiographiques qui favorisent la prise de recul par rapport à des événements passés, parfois traumatiques.
L’écriture n’est pas seulement le lieu de la reprise de soi à soi, elle est également inscription du corps dans l’espace.
« L’écriture est affaire de mains et de corps peut-être avant d’être affaire de tête », écrit François Bon, animateur d’atelier d’écriture, auteur et dramaturge.
En atelier, chacun prend sa place, souvent la même, puis investit son espace de travail comme son territoire. Il suffit d’observer le corps de l’écrivant qui sort de la dispersion dans laquelle il se trouvait en pénétrant dans la salle, pour se rassembler, se relier à lui-même en se penchant sur sa feuille. Il faut entendre le bruit des stylos qui griffent le papier, le raturent pour y laisser une trace matérielle visible de tous.
L’investissement spatio-temporel de la page par l’écriture est une première inscription tangible de son rapport au monde et à l’autre.
Même le choix de la prise en main du cahier, l’occupation de l’espace matériel de la feuille permettent de donner une première inscription de soi et offre une prise sur un univers qui tend parfois à se dérober dans le cadre de certaines pathologies. Il n’est qu’à voir la jubilation de certains participants à feuilleter leur cahier rempli de signes : « J’ai déjà écrit tout ça ! ».
L’écriture en atelier se trouve bien loin de la pratique solitaire et de l’image romantique de l’écrivain dans sa tour d’ivoire. Elle est une activité sociale, culturelle et transgénérationnelle qui inscrit dans la relation à l’autre, dans la mesure où elle implique la présence d’un lecteur ou d’un auditeur.
Dans Le créateur littéraire et la fantaisie (1908), Freud affirme que c’est la possibilité d’une prime de séduction qui suppose que la création établisse un lien entre créateur et spectateur. Être lu permet à celui qui crée, d’être reconnu et de bénéficier des présupposés toujours attribués au poète, « gloire, richesse et, accessoirement, amour des femmes » !
La reconnaissance par l’autre (que ce soit le groupe ou l’art-thérapeute), l’écoute attentive et bienveillante que permet le cadre de l’atelier sont primordiales car elle favorise la confiance, l’estime de soi et l’inscription dans une forme d’altérité.
Si l’écriture peut être le lieu de la reprise entre soi et les autres, elle peut être aussi le lieu de la reprise psychique entre soi et soi.
Quels sont les liens psychiques que permet de renouer l’écriture ?
L’écriture comme mode de « reprise » entre soi et soi
Pour comprendre les fonctions psychiques de l’écriture, et comment elle peut être le lieu d’une reprise entre soi et soi, nous reprendrons la métaphore freudienne du « bloc magique » qui permet de décrire par analogie le fonctionnement de l’appareil psychique à celui d’une machine à écrire.
Il s’agit d’un jeu pour enfant, une ardoise magique possédant un premier feuillet sur lequel ce qui s’inscrit en surface peut s’effacer, mais reste gravé dans la couche inférieure, sur un second feuillet. Ce qui s’inscrit sur un premier feuillet s’efface dès qu’on le soulève, ce qui le rend disponible pour une autre inscription, tandis que la trace subsiste en creux dans la cire du deuxième feuillet, dans notre partie inconsciente.
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